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Moi, c'est Sponge.
Je suis gorgée de maux.


Et je vais tout
essorer.

    Je m'appelle Sponge. J'ai 27 ans au moment où j'écris ces lignes. J'aime l'avocat, le fromage et les bisous dans le cou. J'aime faire de la musique, inventer et écrire. J'aime me creuser la tête, songer et re-songer, rêvasser voire même rêver; l'envie me prend souvent. 
    Ce sont les meilleurs moments : des flashs d'histoires venant d'un peu partout - et de n'importe quand - se succèdent, l'allure dépendant de l'humeur, projetés d'on ne saurait quel engin et tapissant jusqu'aux plus sombres recoins de mes tissus neuronaux. Ils se suivent de plus en plus vite jusqu'à former vie, comme dans un trajet en train où chaque parcelle de près étirée et déformée par la vitesse, représente à elle seule un univers à part entière, un terrain de jeu laissé vulnérable à l'entropie et au chaos de l'univers pour que s'y passent les plus grands des cataclysmes et les plus insignifiantes interactions. 

   Je m'appelle Sponge. J'ai 27 ans et si le multivers et Dieu existent, alors ce dernier est probablement, comme moi, TDAH. Et comme lui j'ai autant de mal à commencer les choses qu'à les poursuivre, puis qu'à les finir.
   Ce sont les quatre lettres qui pourraient résumer à elles seules les errements singuliers de ma psyché, et les difficultés qui m'ont amenée jusqu'ici artistiquement, avec ce projet. Mais je suis une éponge, gorgée de maux, et blablabla... C'est écrit en gros.
   Je m'essore donc à nouveau : en plus de l'inattention, du déficit de concentration, de l'hyperactivité, des dysfonctions exécutives, de la dépression, de l'anxiété sociale, des troubles de l'humeur, (etc.) j'ai la chance d'être bipolaire (saurez-vous retrouver le sarcasme). 
 

 

    Je retrouve beaucoup de similitudes dans ces deux conditions, dont par exemple cette extase béate et addictive lorsque, du fait d'une phase maniaque ou d'hyperfixation, l'on se voit architecte et bâtisseuse de projets artistiques tantôt révolutionnaires mais disruptifs, tantôt avant-gardistes mais superficiels, assaillie de rappels incessants pour travailler des détails à peaufiner, des personnages à développer, des mondes à créer...
    Surtout lorsqu'il n'y a pas d'objets précis à mes obsessions, mes méninges se complaisent dans une pluralité maladive, dans une hyperactivité vicieuse et pourtant taquine, presqu'attachante... Un petit rien pourra souvent me guider sur le chemin d'une idée brillante à polir, mais mon cerveau se contentera bien souvent de la beauté du geste, préférant déjà étirer ses griffes de prédateur sur la prochaine pensée stimulante à négliger... Lorsqu'on est TDAH, d'autant plus étant bipolaire, il n'y a jamais d'histoire plus intéressante que la prochaine, celle qu'on a pas encore commencée à raconter. On est constamment dans le potentiel. Dans ce qui pourrait arriver. 

   Ce qui nous amène à la raison de ma présence ici. A la raison de ce projet : le potentiel. Je veux arrêter ce massacre. Je veux arrêter cette tragédie de voir des centaines d'œuvres commencer et ne jamais finir. Et en même temps... Je ne veux pas les finir... Ni même les commencer pour la plupart... Pas l'énergie. Et pas l'envie ! D'ailleurs, beaucoup d'entre elles n'auraient de toute façon pas mérité la moindre considération. Si ce n'est la majorité. 

 

   Je me suis longtemps posée des questions comme : "quoi écrire ?", "sur quoi écrire ?", "qui voudra me lire ?" car il m'avait toujours manqué la réponse à cette question simple : "que veux-tu dire ?" 

 

   Je décide donc de vous jeter des morceaux de puzzle au visage, et de vous mettre au défis de me dire si les pièces se regardent à l'horizontale ou à la verticale. Je décide d'écrire cette tragique tirade au ton pourtant pittoresque,  et je laisse aux romantiques l'espoir que l'héroïne n'ait pas avalé la sigue à l'acte V, et aux experts fruitiers le luxe de décréter si tel sonnet évoque une mangue ou plutôt une peau en âge en plein ébat, ou aux cinéphiles la joie de rêver un texte en voix extradiégétique drôle et cynique faite par le doubleur français officiel d'Edouard Norton... 
    Plutôt que d'être paralysée par l'idée de commencer une œuvre que je risquerais de ne pas finir, je décide d'en créer une qui n'a juste pas de fin à atteindre. 

   Et il n'y a plus qu'à s'y mettre.

ps : Si je présente parfois des mondes si étranges, si hostiles et à la fois banales, si fantastiques, étourdissants dans l'enfer de nos vies et de nos conditions sociales, notamment dans mes œuvres théâtrales, c'est à la fois pour mettre des mots, des impressions, des ressentis mêmes vagues, sur des années à être étrangère de la société, mais aussi pour rendre hommage à ce doux, bizarre mais réconfortant palais de mes idées, des mes angoisses apaisées, où je me réfugiais quand j'en sentais le besoin. "Se renfermer sur soi" est une expression beaucoup plus parlante que certains ne le pensent.

Ah et au fait, je suis une meuf trans. 

Oui, je sais, l'éponge qui se gorge, tout ça ... 

 

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